jeudi 28 mai 2009

La méthode constructive

Tiré du livre "Types psychologiques", de C.G. Jung
Chapitre des "Définitions"

Le terme de « constructif » insiste sur l’idée de construire. Par « constructif », je désigne une méthode qui est à l’opposé de la méthode réductive. La méthode constructive s’applique à l’élaboration des matériaux inconscients, rêves, imaginations, etc… Son point de départ est la production inconsciente qu’elle considère comme une expression symbolique qui anticipe en image un fragment du développement psychologique. Moeder attribue même à l’inconcient une fonction prospective proprement dite qui anticiperait, comme en se jouant, le développement psychologique futur. Adler aussi reconnaït à l’inconscient une fonction anticipatrice. Il est certain qu’il ne faut pas se contenter de considérer les produits de l’inconscient uniquement comme quelque chos d’accompli, qui a été fait, qui est devenu, comme des élaborations en quelque sorte terminales, car ce serait leur dénier toute signification en rapport avec l’évolution de l’existence. Freud lui-même reconnaït au rêve un rôle téléologique, au moins en tant que « protecteur du sommeil », tout en réduisant pour l’essentiel aux seuls « désirs » sa fonction prospectrice. Cependant, on ne peut nier a priori le caractère finaliste des tendances inconscientes, par analogie avec d’autres fonctions psychologiques ou physiologiques. C’est pourquoi nous considérons le produit de l’inconscient comme une expression orientée vers un but ou une intention qu’il caractérise en langage symbolique. Conformément à cette conception, la méthode constructive ne s’occupe pas des sources proprement dites, ni des éléments originels du produit de l’inconscient; elle cherche une traduction claire et compréhensible en général de la création symbolique. Les associations libres qui viennent à l’esprit à propos du produit inconscient sont donc examinées moins sous l’angle de leur provenance possible que par rapport à un but éventuel qu’elles indiqueraient;on les envisage au point de vue du faire et du non-faire futurs; leur relation avec l’état momentané du conscient doit tout particulièrement être prise en considération, car, selon la conception compensatrice, l’activité inconsciente contrebalance toujours l’état du conscient ou le complète. Comme il s’agit ici d’une préorientation, le rapport réel à l’objet a beaucoup moins d’importance que pour la méthode réductive qui s’occupe de rapports qui ont réellement existé. Ce dont il s’agit, c’est surtout de l’attitude subjective où l’objet est avant tout un indice des tendances du sujet. La méthode constructive cherche donc à établir le sens du produit inconscient pour l’attitude future du sujet. Or l’inconscient ne pouvant, dans la règle, créer que des expressions symboliques, la méthode en question sert à élucider le sens de ces expressions de telle sorte qu’on en puisse tirer une indication qui mettrait la conscience dans la bonne voie; elle procure donc au sujet cet accord avec l’inconscient dont il a besoin pour agir.

Aucune méthode d’interprétation psychologique ne peut se fonder uniquement sur les associations de l’analysé : la méthode constructive elle aussi recourt à certains éléments de comparaison. L’interprétation réductive emprunte les siens à la biologie, à la physiologie, au folklore, à la littérature ou ailleurs; de même le procédé constructif pour traiter des problèmes intellectuels recourt aux faits parallèles que présente la philosophie, et à ceux de la mythologie et de l’histoire des religions quand il s’agit des problèmes de l’intuition.

La méthode constructive est forcément individualiste parce qu’une attitude collective future ne se développe qu’en partant de l’individu. Au contraire la méthode réductive, ramenant tout fait individuel à l’attitude ou au fait fondamental et général, est collective. On peut soi-même appliquer la méthode constructive à ses matériaux subjectifs; elle devient alors une méthode intuitive affectée à l’élaboration du sens général du produit inconscient. Cette élaboration se fait par enchaînement associatif de matériaux qui enrichissent et approfondissent l’expression symbolique (par exemple : le rêve) de telle sorte qu’elle atteint la clarté qui en permet la compréhension consciente. Enrichie et approfondie de la sorte, l’expression symbolique se trouve placée au sein de connexions plus générales qui en permettent l’assimilation.

1 commentaire:

  1. Je retiens que j'ai des croûtes à manger avant de comprendre CG Jung ! :-) ■ paumier.

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